Hélène Zidi est un pilier du festival depuis de nombreuses années. Elle est comédienne, metteuse en scène, directrice de théâtre… De multiples fonctions qu’elle remplit avec talent. Rencontre avec une artiste exceptionnelle.
Les Noctambules d’Avignon : Bonjour, présentez-vous.
Hélène Zidi : Je suis une pâte feuilletée. Je suis une multitude de choses, une accumulation d’expériences depuis que j’ai l’âge de quinze ans.
J’ai fait le conservatoire de Nice, puis j’ai commencé à jouer très très jeune au théâtre de Nice, au conservatoire de Nice avec Jean-Pierre Bisson. Puis, je suis montée sur Paris. Je suis allée à New York et j’ai participé à l’Actor Studio. J’y ai monté ma deuxième pièce intitulée “Full for Love” avec Neil de Saint Shepard. J’ai joué pendant dix ans sans m’arrêter avec Daniel Darrieux, Bernard Rura, enfin plein de gens. Que vous dire d’autre, j’ai été directrice de casting pendant des années, j’avais besoin de comprendre ce qui se passait derrière. C’est-à-dire le fond entre le stress du réalisateur, le stress du producteur comme nous en tant qu’acteur on est très centré sur nous, sur nos angoisses, sur nos pratiques, nos peurs et je me suis dit c’est intéressant aussi de comprendre les angoisses des autres pour se désangoisser soi-même en fait. J’ai fondé le laboratoire de l’acteur qui a commencé à prendre très très très rapidement grâce aux acteurs. Ces acteurs devant ma caméra m’ont permis de comprendre beaucoup de choses. Enfin, le théâtre m’habite donc je suis directrice du théâtre du roi René depuis maintenant des années. Je fais de la programmation, je suis auteure, je suis dans la scène, je suis comédienne, en fait je touche à pas mal d’aspects du spectacle vivant.
LNA : Avant de parler de ces différentes casquettes, est-ce que vous pouvez me parler de votre relation avec le festival d’Avignon
HZ : La relation, elle s’est faite très jeune quand je suis venue à l’âge de quinze ans et j’ai été absolument subjugué de voir autant de gens passionnés. J’ai adoré cette effervescence, cette créativité, ce partage de passion, ces gens qui vivent le théâtre et je me suis dit un jour je reviendrai.
Vous avez plusieurs casquettes : directrice de théâtre, metteuse en scène notamment de Gazon Maudit, l’année dernière comédienne dans Quand on sera grand.
LNA : Quelle est la casquette qui vous plaît le plus ?
HZ : C’est vraiment un tout. C’est des plaisirs différents évidemment à chaque fois, mais toujours dans le même art. Donc j’adore programmer parce que je suis quelqu’un qui adore les artistes donc j’adore voir les pièces de théâtre, j’adore imaginer une vision. Je suis assez intuitive et visionnaire, donc je vois comment je peux articuler ce patchwork de production de programmation.
J’adore mettre en scène, j’adore écrire, j’adore jouer. C’est multiplaisirs en fait, c’est plaisir différent et j’adore transmettre. Je privilégie la qualité à la quantité.
La transmission est aussi importante pour moi. Je veux voir les acteurs travailler. On les fait travailler dans la réalité de ce qu’est ce métier pas du tout dans le fantasme.
LNA : Le théâtre du roi Renéest un lieu extraordinaire, comment a commencé son histoire ?
HZ : Ce lieu est déjà un monument historique. Le théâtre a commencé dans la salle du roi. C’est une chapelle du XVe siècle qui est restée complètement dans son jus. Ça fait un peu les bouffes du nord avignonnais, c’est comme ça que les gens l’appellent. On a commencé dans cette salle avec 40 sièges. Puis ensuite, il a fallu investir dans des gradins. Dès le départ, c’était compliqué. La salle du roi n’était libre que l’après-midi. Ce n’était pas rentable. Mais ce n’est pas grave. Moi, je vois à long terme, j’ai des visions. Je marche par vision, je savais. Ce n’est pas grave ça, je vis autrement ailleurs, je travaille, j’ai mon école, j’ai mon théâtre à Paris. Donc moi ce qui m’intéressait c’était de voir à long terme. C’est maintenant une réussite car on a pu s’agrandir avec la salle de la Reine quand la droguerie a fermé. Et cette année, une nouvelle aventure commence.
LNA : Parlez-nous de cette troisième salle
HZ : Elle est magnifique on est complètement scotché parce que je ne pensais pas que ça allait donner ça. Au début on se dit bon on va faire du spectacle de rue. On a fait du troc avec une compagnie qui est arrivée qui a mis sa scène et puis on voit les choses se transformer c’est absolument incroyable. C’est super beau, c’est beaucoup plus que du théâtre de rue en fait c’est vraiment un théâtre plein air. Ça donne la possibilité à des artistes de pouvoir se produire à moindres frais parce que tout le monde n’a pas les moyens de se payer un créneau horaire et de rester trois semaines de festival. Donc là on a plusieurs compagnies qui viennent, qui jouent 5 ou 6 jours.
LNA : Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour ce festival ?
HZ : Des spectateurs dans les salles. Tout le monde en demande. C’est beau le spectacle vivant parce qu’on s’écarte un peu de nos écrans et on échange, on se regarde vraiment dans les yeux, on partage les émotions, on découvre des artistes incroyables. Moi je trouve que le niveau du théâtre dans le festival a énormément augmenté, c’est extrêmement qualitatif Donc oui, des spectateurs et faire rire les gens, leur faire oublier un petit peu les tracas et ce climat très anxiogène, il n’y a que les artistes pour arriver à passer des messages et à transmettre des émotions.